L'hôtel de Matignon
15 mars 2023L'année dernière, j'ai commencé les Journées du Patrimoine par la visite de l'Hôtel de Matignon, résidence et lieu de travail du chef du gouvernement français. J'avais réservé un créneau horaire de visite et on nous fournissait un petit livret papier d'aide à la visite.
L'hôtel est construit par l'architecte Jean Courtonne (1671-1739) à partir de 1722. Jacques IV de Matignon s'y installe à partir de 1725 avec sa femme Louise-Hyppolite Grimaldi, princesse héritière de Monaco. L'hôtel fut la résidence parisienne des princes et princesses de Moncaco jusqu'en 1789. Au début du XIXème siècle, l'hôtel est acquis par Talleyrand, puis acheté par Napoléon Ier et passe à la famille d'Orléans en 1815. Le duc et la duchesse de Galliera en font l'acquisition en 1852 et le restaure. De 1889 à 1914, c'est l'ambassade d'Autriche-Hongrie qui occupe l'hôtel. L'hôtel et le jardin sont classés monuments historiques en 1923. A partir de 1935, l'hôtel est affecté au chef du gouvernement français.
La visite commence dans la cour d'honneur. En 1989, la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen a été installée sur une toile marouflée sur le mur de l'aile Est.
On accède à l'hôtel par le perron utilisé lors des évènements protocolaires (visites officielles, passations de pouvoir). Dans le vestibule assez sobre, se démarquent : buste à l'antique sur une demi-colonne, torchère d'époque Empire et sol en marbre blanc et rouge du Second Empire.
Sur la droite, on passe dans un petit salon qui nous permet d'accéder à l'escalier d'honneur. Les murs et le plafond sont couverts d'un trompe-l'oeil en peinture réalisé en 1855. La rampe en fer forgé date de la construction en 1724. Du plafond pend une lanterne Empire en bronze doré. Elle éclaire l'escalier depuis 2013.
On entre dans l'antichambre : à la fois espace de croisement pour accéder aux différents bureaux des membres du cabinet et d'attente pour les invités du chef du gouvernement. Moderne et ancien se mêlent : tapisserie murale de Le Corbusier, tapis réalisé à la Manufacture de la Savonnerie en 1966 ; au plafond un beau lustre, au centre sièges et table ronde marquetée de marbre d'époque Empire.
Me voilà dans le bureau de la Première ministre, également appelé salon blanc. L'ameublement évolue selon les goûts et besoins de chaque Premier ministre. Actuellement, c'est un bureau de style Louis XV, utilisé par Léon Blum lors des accords de Matignon en 1936. Le salon autour de la cheminée est contemporain avec un tapis, tissé en 2017 à la Manufacture de la Savonnerie d'après un carton d'Annabelle Huart.
Les lambris sculptés datent de la construction de l'hôtel. De nombreuses peintures décorent ce salon : deux médaillons ronds entourent la porte d'entrée (Le jeune pêcheur et La diseuse de bonne aventure), ce sont des pastiches du XIXè siècle de style François Boucher, réalisés par le peintre Pierre-Nicolas Brisset (1810-1890). Les peintures au-dessus des portes représentent les Saisons, réalisées par Fragonard entre 1751 et 1756.
A côté du bureau de la Premièr ministre, on traverse "le fumoir". Cette pièce est utilisée en tant que salon ou comme bureau pour de proches collaborateurs de la Première ministre. Ses murs sont recouverts de soieries dorées et ornés d'oeuvres du Musée national d'art moderne et du Fonds national d'art contemporain.
La suite de la visite se passe au rez-de-chaussée, on reprend l'escalier d'honneur pour y accéder.
On entre dans la grande salle du conseil qui fait presque penser à une galerie. C'est ici que se déroulent les réunions les plus importantes (environ 350/an). Le parquet et les décors muraux ont été restaurés en 2021.
A l'origine c'étaient les appartements privés de la princesse de Monaco. Puis, les Galliera en ont fait une grande salle à manger d'apparat pour de grandes réceptions, ornée de pilastres corinthiens, boiseries dorées et d'une tapisserie de la Manufacture des Gobelins tissée entre 1763 et 1765, issue de la Tenture de l'histoire de Don Quichotte. Elle est témoin depuis presque un siècle de la vie politique française.
La suite de la visite se faisait du perron donnant accès au jardin. Je n'ai pas vu le salon jaune qui était en travaux. Je me suis arrêtée pour observer un grand treillage richement décoré faisant presque office de brise-vue pour le voisinage.
On passe devant le salon bleu, pièce protocolaire qui sert de lieu d'entretien des délégations françaises et étrangères dans le cadre des visites officielles. Les boiseries des murs datent de la construction. Les dessus-de-porte sont décorés de peintures en camaïeu bleu du XVIIIe siècle attribuées à Christophe Huet. Elles représentent des chinoiseries.
Puis le salon rouge, salle de réception marquée de plusieurs époques : les boiseries sont du XVIIIè siècle quand le salon servait de salle de trône aux princes de Monaco, des médaillons de pierres dures ajoutés par les Galliera au XIXè siècle, ainsi que des dessus-de-porte peints par Pierre-Nicolas Brisset.
Certaines portes donnent accès aux bureaux du Secrétariat général du Gouvernement que nous ne pouvions pas visiter.
Pour finir une agréable balade dans le jardin de près de 2 hectares. Depuis 1978, il est de tradition que chaque premier ministre plante un arbre contribuant ainsi à renouveler le patrimoine arboré du jardin.
Au cours de la balade, un petit arrêt pour observer des moutons, plus précisément des mérinos de la Bergerie Nationale de Rambouillet.
J'ai pu compléter ma visite en consultant le livre "L'hôtel de Matignon. Du XVIIIe siècle à nos jours. Ed. La documentation Française, 2018, (275p.)". Un livre richement illustré qui retrace toute l'histoire de l'hôtel et de ses multiples occupants.